Forum Bois Construction : l’enjeu immobilier

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Fordaq JT
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De g. à dr. : Frank Mathis, AdivBois, Jean-Paul Viguier, architecte, Thierry Laroue-Pont, BNPPAribas Real Estate, Stanislas Pottier, BBCA, Noredine Hachemi, Kaufmann&Broad. (Photos: JT)

La septième édition du Forum, à Nancy, a tenté de désenclaver ce congrès en s’ouvrant sur le monde de l’immobilier. Un atelier dédié et hors cadre a été animé par la rédaction du média spécialisé Immoweek. La formule a permis de mobiliser certains parmi les plus grands investisseurs immobiliers de France.

Un intérêt durable

Le monde de l’immobilier et le monde de la construction bois ne se connaissent pas encore très bien. Souvent, la compétence du petit monde de la construction bois s’arrête à l’acte de construire. Sur le terrain,  cette activité n’existerait guère, s’il n’existait pas des donneurs d’ordre, des investisseurs. Par le passé, en matière de construction bois de maisons individuelles, le gros de la maîtrise d’ouvrage était constitué de clients privés.  Très progressivement, les bailleurs sociaux se sont mis à tester le bois, tandis que la maîtrise d’ouvrage publique encourageait cette filière émergente, notamment dans le domaine des établissements scolaires ou culturels. A présent, une nouvelle étape est en voie d’être franchie, celle des opérations de promotion privée ayant recours au bois, qu’il s’agisse de bâtiments tertiaires ou de logements collectifs.

Interactions croissantes

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Keynote de l'habitué Guillaume Poitrinal, promoteur et acteur du monde du bois. A gauche, Pascal Bonnefille, directeur de la rédaction d'Immoweek, et Brice lefranc, journaliste à Immoweek.

Le Forum, au cours des sept dernières éditions, a fidèlement tracé ces initiatives pionnières. Il y a eu l’aventure Ywood de Nexity, l’arrivée remarquée de Guillaume Poitrinal, acteur-phare de l’immobilier, dans le monde du bois. Parallèlement, on a vu apparaître dans la pépinière de Montreuil un promoteur, REI, résolument ancré dans le bois, ce qui constituait une première nationale. Et puis il y a eu la caisse de résonnance de l’opération Réinventer Paris, avec ses nombreux projets faisant une large place au bois, du moins en phase concours. S’ajoutent désormais, au travers de l’association BBCA et d’ADIVBOIS, des structures mêlant des investisseurs immobiliers et des acteurs de la construction bois. Porté par AdivBois, l’enjeu de la construction de tours en bois a suscité un véritable engouement, du moins du côté des municipalités de villes grandes et moyennes, des architectes. Dans ce contexte, la ville de Bordeaux joue un rôle de détonateur, accueillant deux tours en bois et d’autres ouvrages de moyenne hauteur.

Réserves

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Environ 120 personnes assistaient à cette rencontre. 

Les difficultés de l’Ilot Bois à Strasbourg montrent cependant que la rencontre entre l’immobilier et le bois ne sera pas de l’ordre du coup de foudre. Le monde de l’immobilier est fort bien traité par la filière béton qui constitue la référence à tous les niveaux. En comparaison, le bois suscite certes une certaine curiosité, mais également une appréhension. Car les investisseurs ont suffisamment de soucis pour ne pas s’en créer d’autres à cause de la nature du bâti.  Côté béton, la prise en main est totale et les majors se chargent de tout. Avec le bois, c’est beaucoup plus compliqué,  les structures du marché ont bien du mal à comprendre le monde de l’immobilier,  voire à dépasser leur mode d’intervention en sous-traitant des majors du béton. La réciproque est tout aussi vraie : il peut arriver que les opérateurs immobiliers envisagent de verdir leurs projets pour mieux les vendre, en dépit du bon sens économique, et sans la moindre compréhension pour les tenants et les aboutissants d’une filière qui n’a qu’à se débrouiller pour suivre.

Protocole

De g. à dr. : Pascal Bonnefille, Immoweek ; Frank Mathis présentant le Vade-Mecum pour la construction d'ouvrages de moyenne et grande hauteur en bois. 

La rencontre entre les deux mondes ne se fait que très progressivement, sans doute au sein d’AdivBois, de BBCA. Et justement, par l’intermédiaire d’Immoweek, au Forum de Nancy. Une rencontre qui en appelle d’autres, car la filière construction bois n’a sans doute pas pris la mesure de la présence d’acteurs comme Thierry Laroue-Pont ou Noredine Hachemi. Les organisateurs avaient ménagé un créneau en prime time, fin de la première matinée, dans un congrès sur la place de la gare permettant un aller-retour Paris-Nancy bien ramassé. Au Centre Prouvé, la filière bois ne se montrait pas sous un mauvais jour en cette matinée de printemps, avec l’espace d’exposition, les installations  magnifiques de l’ENSA Nancy et l’espace VIP d’AdivBois. Les grands décideurs de la filière étaient là pour l’accueil. Dommage que la plénière d’ouverture se soit éternisée, bousculant le timing des ateliers. Les investisseurs ont sans doute aussi estimé que l’auditoire était clairsemé, car une bonne centaine de personnes parsemait le grand auditoire de 850 places. C’est que les deux ateliers parallèles, celui consacré à la construction avec les feuillus, et celui dédié à la performance énergétique et environnementale, ont fait salle comble.

 

L'immobilier autrement

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Stand VIP d'AdivBois après l'atelier. 

La rencontre avait été préparée par Immoweek en veillant bien de ne pas accabler les investisseurs d’explications techniques sur la faisabilité et l’excellence du bois, même si Frank Mathis a finalement joué son rôle d’intercesseur en évoquant notamment le nouveau Vademecum.  Pas de présentation imagée de grande opération marquante en bois parrainée par BNP-Paribas Real Estate ou Kaufmann&Broad. L’équipe d’Immoweek, qui connaît et suit ces interlocuteurs de premier choix, a fait les présentations et l’intermédiaire, si l’on excepte quelques questions de l’auditoire. La première émanait d’un jeune architecte qui a eu le culot de demander quelle place les investisseurs comptaient réserver aux jeunes architectes dans leurs nouveaux projets. Avec un peu de bonne volonté, on peut y lire une vraie question, celle du renouvellement des acteurs de la construction, nécessaire pour faire évoluer les pratiques. Mais si l’on s’en tient au fait que les acteurs de la tribune gèrent pour certains de dizaines de milliards d’euros d’actifs à long terme, il faut bien se rendre à l’évidence que la question de l’âge de l’architecte, et même de l’architecte tout court, est bien secondaire. Architecte encore, Olivier Leclercq d’AIR architecture a mis le doigt sur un point éventuellement plus sensible. Avec le bois, il devient possible d’aborder mieux que précédemment le marché de l’immobilier éphémère, comme cette extension d’hôpital sur laquelle son agence travaille et dont la durée de vie devrait être limitée à 5 ans.  5 ans et pas 50 ans, justement. Pour l’heure, ce marché peut être considéré comme négligeable. C’est au mieux une niche, même si  un participant allemand du Forum l’a chiffré à au moins un demi milliard par an en Allemagne, migrants oblige. Prévoir le changement d’affectation des locaux, l’anticiper, cela semble le principal enjeu face auquel le bois doit parvenir à apporter une réponse convaincante.  Il fallait être là et avoir l’oreille fine, car les investisseurs immobiliers ne vont pas perdre beaucoup de temps à faire de la pédagogie. En fait, c’est à la filière d’apprendre à comprendre ceux qui financent la construction, leurs besoins réels et possibles.  En l’occurrence, la revue Immoweek propose des cours de rattrapage quotidiens.

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